Autrefois, j'avais écrit ces mots (en latin) sur le tableau qui portait nos noms au dortoir. Maintenant il n'existe plus, mais
la Parole demeure. Avant de m'endormir je dis à Jésus : Je vais dormir, mais mon cœur veille avec le tien.
Mais si je prends cette parole de façon plus personnelle, il me semble que ce n'est pas le langage de I 'amour. L'amour ne dort pas, car il est la rencontre d'une présence et la recherche de cette présence, il ne supporte pas I 'absence. Aimer avec un ceur qui veille seulement, est-ce vraiment aimer ? Pour aimer, il faut un cœur éveillé, un cœur émerveillé qui cherche à se donner, à se prouver.
Et c'est là que commence le drame. Est-ce que trop souvent mon cœur n'est pas endormi ? Il est des moments où je me
sens tout à fait apathique, sans élan, sans foi, sans réaction intérieure. Tout est vide en mon esprit et mon cœur. C'est la
nuit noire. Je ne sais plus si j'aime Jésus ni s'il m'aime. Quelle souffrance, qui me fait crier encore plus fort : Jésus, tu sais tout, tu sais bien que je t'aime, que je désire t'aimer. C'est ma seule prière, et elle est spontanée, mais est-elle bien vraie ? Il est parfois difficile de retrouver la paix.
En méditant cette Parole, j'ai revécu ces moments pleins d'angoisse, où I'on ne voit plus rien. Je dors et mon cœur veille, mais je me demande quelle est la valeur de cette seule veille de mon cœur. Pourtant, c'est parce qu'il veille qu'il entend la voix de Jésus me dire : Ouvre-moi, ma sœur, mon amie, ma colombe. Il me demande de lui ouvrir avec des mots
de tendresse inouïe. Il attend que je lui ouvre, il se contente de frapper.
Quelle est alors ma réponse ? La bien-aimée du Cantique a bien des excuses pour tarder. Et moi ? Des refus conscients aux appels de Jésus, vraiment je ne crois pas, je fais ce que je sens ou vois qu'il me demande. C'est d'ailleurs la seule chose qui m'aide à retrouver la paix. Mais peut-être est-ce un refus, ce manque d'oubli de moi, en ce moment, pour accepter les sacrifices que m'imposent mon état physique et ma solitude.
Seigneur Jésus, oui, je Ie comprends, l'amour cherche Ia présence. Ton amour me cherche bien mieux que le mien. Tu me demandes de t'ouvrir et de t'accueillir. Pardon pour mes lenteurs el mes hésitations. Garde-moi un cour éveillé qui te
désire et te soit plus disponible.